lundi 8 décembre 2008

Cet été, Bonne Maman est morte. - Foucauld Giuliani

Cet été, Bonne Maman est morte.

Les mois qui précédèrent son décès furent singuliers dans la mesure où sa maladie fut particulièrement foudroyante. Elle n’eut pas le temps de changer.

Le changement agit sur le reconnaissable, il modèle le familier, il malaxe l’identité, il affecte l’image, la représentation d’un être ou d’un objet cher. Le changement prélude à la disparition, il chante la mort, bien doucement, jusqu’à l’embrasser et se confondre avec elle. Cet accouplement hâtif, violent accouche de la mutation définitive.

Pour l’être, c’est la disparition.

Elle, n’a pas changé. Du moins, son image est restée celle de la femme vivante, active et affairée. Certes, le changement agissait, il érodait, il effectuait son éternel travail de sape et d’usure, sur l’accomplissement des gestes habituels, sur l’enchaînement des pensées, mais son murmure semblait naturel, évident. Ces vagues de fond nous travaillent tous, elles s’étendent largement dans le temps. Perverses, elles n’incarnent pas le véritable changement. Elles lui offrent les attributs de flegme et de lenteur. Elles le rendent tolérable. « Laissons le tranquille, il fait son métier, il accomplit simplement le mouvement de la vie, il est si sage. Ne l’apeurons pas, nous le brusquerons, nous n’aboutirons qu’à accélérer son entreprise. »

Chez Elle, les vagues de fond se métamorphosèrent en lames meurtrières.
A la bonace succéda la tempête, et le navire encalminé, comment comprit-il ce déchaînement imprévisible ? Le doux tangage du temps qui passe, régulier et attendu, se mua. Les torrents affluèrent, en cadence effrénée, ils affolèrent.

Et ils renversèrent.

Foucauld Giuliani

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